11 mai 2006

Une communication de la Commission

12 mai La Commission européenne a adopté le 10 mai une communication sur l'avenir de l'Europe qu'elle soumettra au Conseil européen des 15 et 16 juin. lntitulée « Un agenda des citoyens: obtenir des résultats pour l'Europe », elle vise une « Europe des résultats » qui réponde de façon concrète aux attentes et exigences des citoyens. Avant de m’absenter pour une semaine, je crois utile de reproduire ici l’essentiel de cette communication.
Le point de départ de la Commission est le constat que, en ce qui concerne la Constitution européenne, « il n'existe en ce moment pas de consensus » entre les Etats membres sur les mesures à prendre pour sortir de la crise, et qu'il faudra donc du « temps supplémentaire » avant de pouvoir envisager de régler la question institutionnelle, a expliqué le président de la Commission José Manuel Barroso devant la presse. Même si la Commission « reste attachée aux valeurs, aux principes et au contenu de la Constitution », elle ne souhaite pas que l'impasse constitutionnelle paralyse ou empêche l'action politique de l'UE. Par conséquent, la Commission propose une « double approche »: (A) adopter et mettre rapidement en œuvre un « agenda positif » permettant d'offrir aux citoyens une « Europe des résultats » en utilisant au maximum les possibilités offertes par les Traités existants, tout en poursuivant (B), parallèlement et graduellement, le débat sur la Constitution européenne en vue de résoudre le problème institutionnel de l'UE, si possible d'ici 2009. Pour José Manuel Barroso et sa Commission, seule l'action concrète et le rétablissement d'un lien de confiance avec les citoyens permettront à l'UE de créer un environnement propice à l'adoption de la Constitution européenne. « Pour renforcer la confiance des citoyens en l'Europe, nous devons produire des résultats. C'est ainsi que nous pourrons créer les conditions propices à l'adoption d'un règlement institutionnel », a-t-il insisté.
(A) « L'Europe des résultats ». Le nouvel « Agenda des citoyens pour l'Europe » que propose la Commission contient une douzaine de propositions concrètes couvrant les grands domaines suivants: (1) Marché intérieur. La Commission lancera une révision fondamentale du fonctionnement du marché intérieur, pour identifier où ce marché unique n'est pas encore entièrement achevé, au détriment des citoyens. Un rapport (« Le marché unique au 21ème siècle »), contenant des propositions concrètes, sera présenté au Conseil européen et au Parlement européen en 2007. Devant la presse, M. Barroso a cité plusieurs exemples d'actions possibles: supprimer les derniers obstacles à la liberté de circulation des travailleurs, aboutir à une meilleure intégration des marchés de l'énergie et des assurances, réduire les coûts de la téléphonie mobile transfrontalière (roaming) ou des services financiers et bancaires transfrontaliers ; (2) Solidarité, opportunités et accès pour les citoyens. La Commission évaluera les réalités sociales de la société européenne et lancera un « agenda pour l'accès et la solidarité ». Cet agenda (qui sera fondé sur les mesures identifiées lors du Conseil européen informel de Hampton Court en octobre 2005) vise à ajouter une dimension sociale à la révision du marché intérieur prévue en 2007 (voir plus haut). Concrètement, la Commission veut aussi améliorer l'information des Européens sur les droits qu'ils ont en tant que citoyens de l'UE. A cette fin, M.Barroso n'exclut pas la possibilité de fournir à chaque citoyen de l'UE une « carte des droits » personnelle (« entitlement card ») lui rappelant ses droits dans le marché unique; (3) Liberté, sécurité, justice. Comme nous l'avions anticipé (EUROPE N° 9187), la Commission proposera aux Etats membres que la coopération judiciaire et policière ainsi que la coopération en matière de migration légale soient transférées du troisième pilier (coopération intergouvernementale) vers le premier pilier des Traités (politique communautaire). La proposition sera basée sur l'article 42 du Traité de Nice et vise à « exploiter au maximum le potentiel qu'offrent les Traités actuels », en l'absence de Constitution européenne, a souligné M. Barroso qui a insisté beaucoup sur le fait que « les citoyens veulent plus d'Europe en matière de lutte contre le terrorisme et le crime organisé ». Je sais que certains pays membres sont réticents à la communautarisation de ces politiques, mais je suis sûr qu'ils changeront d'avis, a estimé M. Barroso qui a cité le mandat européen d'obtention de preuves (actuellement bloqué au Conseil où l'unanimité est requise au titre du troisième pilier) comme exemple qui prouve que l'UE a besoin de règles de décision plus efficaces dans ce domaine crucial. « La question est de savoir de combien de temps ces Etats réticents auront besoin avant de changer d'avis. Devons-nous attendre une nouvelle attaque terroriste en Europe avant d'agir ? », s'est-t-il demandé; (4) Elargissement. Les élargissements successifs de l'UE (et celui de 2004 en particulier) sont « les plus grands succès » de l'UE, mais nous devons néanmoins tenir compte des craintes de beaucoup de citoyens « non pas à l'égard du principe même de l'élargissement, mais à l'égard de sa taille et de sa rapidité », a dit M. Barroso. Au cours des prochains mois, la Commission intensifiera le débat sur la valeur ajoutée des élargissements (afin de convaincre les citoyens) ainsi que sur la définition exacte de la capacité d'absorption de l'UE (l'un des critères définis à Copenhague). Elle présentera ensuite un nouveau rapport sur la future stratégie d'élargissement de l'UE avant le Conseil européen de décembre 2006 ; (5) L'Union européenne dans le monde. Convaincue de l'appui très fort des citoyens européens en faveur d'un rôle plus efficace et visible pour l'UE dans la politique extérieure, la Commission présentera au Conseil un « papier stratégique » (concept paper) avec des idées concrètes sur la possibilité de renforcer les instruments et le rôle de la politique extérieure de l'UE sur la base des Traités existants. La Commission examinera notamment la possibilité d'améliorer la cohérence et la coordination des actions extérieures de la Commission avec celles des autres institutions européennes et des Etats membres ; (6) Subsidiarité, « Mieux légiférer », transparence. En matière de subsidiarité, comme nous l'avions annoncé (EUROPE N° 9188), la Commission transmettra désormais toutes ses propositions législatives et notes d'information directement aux Parlements des Etats membres, en même temps qu'au Parlement européen. Les parlements nationaux pourront ainsi réagir à ces propositions dès le début du processus décisionnel. « C'est une question de transparence, pas de « cherry-picking » ou d'anticipation de la Constitution européenne » qui prévoit justement cette disposition en vue de renforcer le contrôle des parlementaires nationaux sur le respect de la subsidiarité, a souligné M. Barroso devant la presse. « Nous écoutons les ONG, pourquoi ne pas écouter les Parlements nationaux ? », s'est-il exclamé. La lutte contre l'excès de bureaucratie sera également poursuivie à travers l'initiative « Mieux légiférer » et la simplification de la législation communautaire, a annoncé M. Barroso. De nouvelles propositions sur l'initiative « Better Regulation » seront présentées à l'automne, a-t-il annoncé. Quant à la transparence, la Commission envisage d'accélérer les travaux sur l'accès aux documents.
B) La Constitution et le problème institutionnel. Le débat constitutionnel et institutionnel doit se poursuivre parallèlement aux actions et politiques concrètes de l'UE, « étape par étape », en espérant qu'une solution puisse être trouvée en 2008 ou 2009 (la Commission n'a pas de position sur une éventuelle échéance, a précisé M. Barroso). Concrètement, la Commission suggère que le Conseil européen de juin 2006 adopte une sorte de calendrier (« chorégraphie » dans le jargon de la Présidence autrichienne) avec plusieurs rendez-vous importants. Premier rendez-vous: l'adoption solennelle, au printemps 2007, d'une « Déclaration politique » à l'occasion du 50ème anniversaire de la signature du Traité de Rome. Dans cette déclaration, les chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres, mais aussi les présidents de la Commission et du Parlement européen, devraient souscrire à une « obligation d'engagement » en faveur des principes, valeurs et objectifs de la construction européenne et du « projet européen de vie en commun », comme l'a appelé M. Barroso devant la presse. « Je veux défier les leaders européens et leur demander: Êtes-vous ou n'êtes vous pas engagés en faveur du projet européen de vie en commun ? », a dit M. Barroso. Il faut que les dirigeants « se battent » pour le projet européen, notamment chez eux et devant leurs citoyens, au lieu de faire de l'Europe le bouc émissaire de tous les maux comme c'est encore trop souvent le cas, a martelé le président de la Commission. La.déclaration politique, « qui ne vise pas à remplacer la Constitution », doit aussi servir de base pour une décision que le Conseil européen de juin 2007 devrait adopter sur la poursuite et la fin du processus institutionnel/constitutionnel. L'autre grand rendez-vous que la Commission propose est la révision des perspectives financières de l'UE, prévue en 2008-2009, pour laquelle elle devra faire des propositions de réforme de toutes les politiques communautaires, y compris la PAC et les ressources propres de l'UE. Source : Agence Europe N° 9189 du 11.5.06

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